Les projets citoyens d’installations EnR essaiment dans l’Hexagone. Trois questions à Marc Mossalgue, porte-parole d’Energie partagée, association qui conseille, accompagne et finance ce type de projets.

Pourquoi et comment vous êtes-vous intéressés aux collectivités ? Quel accompagnement leur offrez-vous ?

Au départ, ce sont surtout des groupes de citoyens engagés, cherchant une alternative au modèle énergétique actuel, qui nous sollicitaient. Avec la loi de transition énergétique – qui a autorisé la participation directe des collectivités locales dans les projets d’EnR de leur territoire, en capital et en compte courant d’associés – nous en avons vu arriver de plus en plus.

Si les entités les plus importantes en taille étaient déjà engagées dans la démarche (lire notre article « À Lyon, Toits en transition finance et gère des panneaux photovoltaïques citoyens »), les petites et moyennes manquent souvent de compétence en interne pour faire face aux complexités techniques et financières de ces projets.

Elles sont pourtant convaincues du triple intérêt – écologique, économique et social – de ces démarches. Les projets de ce type permettent simultanément de répondre aux objectifs du Plan climat, de  valoriser directement les ressources naturelles des territoires et de mobiliser les citoyens.

Pour les accompagner au plus près de leurs préoccupations, l’association a donc développé un réseau d’antennes régionales*. Nous avons également conçu un cycle de formation de trois modules spécifiques, dispensés par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT). Enfin, il y a quelques semaines, un guide compilant conseils et retours d’expériences a été publié, il est téléchargeable gratuitement.

Zoom : un projet citoyen d’installation de production d’énergie, c’est quoi ?

Derrière ces termes de plus en plus en vogue, on retrouve un véritable mécanisme associant, au sein d’une société par actions ou coopérative, une collectivité et un groupe de citoyen actionnaires désireux de développer une ou plusieurs installations de production d’EnR sur un territoire déterminé.

Au sein de cette société, la gouvernance peut également être partagée, les actionnaires publics et particuliers participant alors aux décisions sur toute la durée d’exploitation du projet.

Depuis sa création, l’association a accompagné 150 projets dans toute la France (chiffres 2016). Existe-t-il un « portrait-robot » de l’installation citoyenne ?

Les installations photovoltaïques sont les plus nombreuses, mais pas forcément les plus puissantes, au regard des conditions solaires hexagonales, de la relative souplesse des procédures et du faible besoin d’investissement en amont du projet (entre 20 000 et 25 000 euros en général).

Le changement tarifaire du printemps dernier va nécessiter cependant de revoir le modèle économique : il sera nécessaire de réaliser des installations citoyennes de plus grandes tailles, d’où un intérêt renforcé pour les citoyens de se rapprocher des collectivités, afin d’identifier les bâtiments les plus pertinents.

À l’autre bout du spectre, les parcs éoliens citoyens sont beaucoup moins nombreux, mais produisent plus. Reste qu’il s’agit de projets juridiques, techniques et économiques complexes… Il faut compter actuellement sept années pour mener à bien un projet de ce type.

Deux autres énergies renouvelables peuvent également être mobilisées sur ce type de projet : l’hydro-électricité, avec la remise à niveau de centrales hydrauliques laissées à l’abandon, essentiellement en région montagneuses, avec une rentabilité relativement faible, et les centrales de biogaz, à l’initiative d’agriculteurs, donc plutôt en zones rurales.

La collectivité doit donc essentiellement s’interroger sur deux paramètres importants : le gisement/ressource dont elle dispose et le niveau de soutien économique qu’elle peut mobiliser.

Énergie partagée peut également participer financièrement à ces projets : comment fonctionne votre outil financier ?

Energie partagée a en effet constitué une société par actions qui peut souscrire directement au capital de projets citoyens d’énergie renouvelable en développement.

Elle compte aujourd’hui plus de 5000 souscripteurs, détenteurs au minimum d’une action de la société d’un montant de 102 euros. Et si ce sont dans leur grande majorité des investisseurs sensibles aux questions énergétiques, ils attendent également une rémunération de leur investissement : notre objectif affiché est donc d’atteindre une rentabilité de 4% par an, versés à partir de la dixième année d’exercice. Déjà cette année, l’action a été valorisée de 100 à 102 euros.

Pour atteindre ce niveau de performance, nous sélectionnons drastiquement les projets dans lesquels nous investissons, en nous appuyant sur des critères économiques et sociaux transparents. Nous privilégions donc des projets compatibles avec notre charte, c’est-à-dire ancrés localement, menés avec un objectif de développement du territoire, à la gouvernance citoyenne…

Par ailleurs, notre réseau évalue également la robustesse technico-économique des projets dans lesquels il intervient en apportant des fonds propres.

* PACA, Ile-de-France, Centre-Val de Loire, Bretagne, Pays-de-Loire, Occitanie, Nouvelle-Aquitaine, Auvergne Rhône-Alpes.